Comment produire du travail de [juste] qualité ?
- paulinefallieres
- 4 sept. 2023
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 10 oct. 2023
Dans le monde professionnel, le travail de qualité est valorisé.
Cela va de soi, aucun client ou manager ne vous demandera d’effectuer un travail vite et mal. Plus le travail sera qualitatif et plus le client aura l’impression d’en avoir pour son argent par exemple. Plus le travail sera bien présenté, détaillé, précis, ou au contraire synthétisé plus un manager pourra avoir l’impression d’avoir un rapport solide sur lequel appuyer ses décisions.
En tant que collaborateur, produire un travail de qualité est consciemment ou inconsciemment aussi important, car c’est une preuve de son engagement, de ses compétences, de sa légitimité à être là où il est et faire ce qu'il fait.
La valeur qualité, est encore plus importante pour le collaborateur qui se reconnait dans le profil du « bon élève », car pour lui plus le travail est bien fait, plus il aura de bons points (comprendre une récompense matérielle ou morale).
Le paradoxe du travail de surqualité
Les collaborateurs très engagés sont souvent tentés « d’en faire plus » s’ils en ont la capacité, quitte à être dans la surqualité.
Par surqualité ce que j’entends c’est le fait d’ajouter ces petits détails qui font que la présentation est plus jolie, avec plus d’informations, avec des vérifications supplémentaires… le tout au-delà de ce qui a été réellement demandé.
Le paradoxe réside selon moi pour le collaborateur qui produit ce travail de surqualité car il est pour lui à la fois nourrissant et épuisant.
Ce que nourrit ce comportement c’est la reconnaissance que le collaborateur tire ou espère tirer de ce travail à plus ou moins long terme : des félicitations, la reconnaissance de ses compétences, l’appartenance au groupe de ceux qui « savent bien faire ça », la sensation d’avoir marqué des points pour la prochaine promotion…
Mais d’utiliser plus de temps et d’énergie que de nécessaire pour une tâche, prive à fortiori de les utiliser pour une autre activité qui pourrait avoir plus de valeur et d'importance. Et même parfois ce comportement peut amener à l’épuisement, tant de temps et d’énergie ont été consommés pour arriver au résultat produit. Surtout si c’est un comportement répété. L’effet peut être encore plus délétère pour le collaborateur quand la reconnaissance attendue n’arrive pas et c’est alors un sentiment de ne jamais en faire assez qui peut poindre son nez.

On aperçoit donc clairement l’intérêt qu’il y a à trouver un équilibre dans le niveau de qualité que l’on met dans son travail, d'autant plus qu'on y est engagé.
Oui mais comment ? Car bien souvent tout cela est soit inconscient et on ne peut pas changer quelque chose dont on n’a pas conscience.
Pour certains, ce fonctionnement est conscient mais paraît impossible à traduire dans les faits. L’impossibilité réside dans le fait de faire moins ou moins bien. En effet, ce serait prendre un risque que cela se voit, que le travail produit est moins bien que d’habitude (toutes proportions gardées) et les "autres" auraient alors une autre image de nous.
Pour aller plus loin, ce qu’il se joue derrière c’est la peur ou plutôt des peurs qui peuvent être aussi nombreuses que variées à l’idée de baisser la qualité de son travail : peur de décevoir, peur de déplaire, peur d’être rejeté, peur de ne pas être apprécié… car le travailleur "bon élève" a pour habitude d’associer sa valeur à la reconnaissance qu’il obtient de son travail. Le problème lui paraît donc bien plus grave que juste « avoir une mauvaise note » c’est-à-dire avoir une remarque disgracieuse d’un client non satisfait… Il s'agit de sa valeur à lui, en tant qu'être humain, qui est en jeu.
Et si tenter de baisser le niveau de qualité de son travail « sans que ça se voit » n’était pas le bon angle d’attaque ? Car factuellement on peut toujours se dire que « ça va se voir ». Une présentation avec des couleurs de bleu différentes ou des tailles de polices différentes, du texte non aligné… ça se voit.
Je vous propose de voir alors l’enjeu ailleurs : il ne s’agit pas de faire moins ou moins bien mais de faire différemment.
Savoir juger le VRAI niveau de qualité attendu
Objectif : sortir du piège de se conformer aux attentes que nous percevons sans les avoir vérifiées !
Si vous êtes un « bon élève » vous avez sans doute des exigences plus élevées que la moyenne. Alors, il est fort à parier que ce que vous interprétez est souvent au-delà de l’attendu réel.
Par ailleurs, vos critères d’importance ne sont pas les mêmes que ceux de vos collègues, votre manager, ou vos clients.
Laisser du flou dans la demande, certains n’ont pas tout à y perdre. Si votre client ou votre manager vous connait bien, il se peut qu’il ne s’embarrasse pas à vous préciser en détail ce qu’il attend car il sait, de vos travaux précédents, que ce que vous allez lui fournir sera TOP. Il vous laisse alors le champ libre car il sait qu'il obtiendra au moins ce qu'il attend, vous vous sentez ainsi en confiance et peut être même avec un sentiment de redevabilité donc vous en faites encore plus pour lui prouver qu'il a eu raison de vous faire confiance...
C’est donc un cercle vicieux qui s’engage pour le collaborateur, alors identifié comme quelqu’un qui fait de l’excellent travail, même s’il le voulait il ne peut plus baisser son niveau de qualité car tout le monde est habitué à son niveau de travail et ce serait prendre le risque de décevoir, ou d’être jugé différemment.
Comment sortir du cercle vicieux sans prendre ce risque ?
En s’intéressant à l’implicite de la demande, autrement dit, qu’est ce qui est réellement attendu et qu’est ce qui retourne de votre exigence ?
Les critères d’évaluation
Il apparait donc essentiel de les connaitre avant de commencer et donc de savoir :
- Qui va les fixer : le collaborateur, le client, le manager ?
- Sont-ils alignés, divergents, avec le même niveau d’importance et donc de priorité ?
- Sont-ils SMART (Spécifiques, Mesurables, Atteignables, Réalistes, Temporellement définis) ?
- Sont-ils négociables ?
Une bonne pratique pour les gros et long travaux est aussi de faire des rendus ou revues intermédiaires. Cela peut permettre au commanditaire de réajuster au besoin ses exigences, en se rendant compte plus concrètement de ce que ça implique sur le travail déjà effectué.
Clarifier les demandes et les attendus est aussi bénéfique pour le commanditaire que pour le collaborateur. En effet, en le questionnant sur ce qui a le plus d’importance pour lui cela lui permet de faire murir son idée, de voir les choses peut être autrement, d’aller à l’essentiel. Tout le monde est donc gagnant à adopter cette manière de fonctionner.
Qu’est ce qui relève du non négociable et qu’est ce qui est de l’ordre de la cerise sur le gâteau ?
Et si vous ne pouvez pas faire clarifier les consignes et les attentes car votre commanditaire n’est pas accessible alors il ne vous reste qu’à réduire par défaut le temps que vous allouez à la tâche !
Vous connaissez certainement la loi de Pareto, aussi connue sous le nom de la méthode des 80/20 selon laquelle 20% des efforts produisent 80% des résultats. Ainsi, pour un bon élève habitué à produire du travail de surqualité, diminuer le temps de travail lui permet alors de supprimer le temps passé à régler les petits détails et donc de produire l’essentiel du travail demandé en restant du travail de qualité.
20% des efforts produisent 80% des résultats
Conclusion
Quand on est un collaborateur de nature « bon élève » on s’impose des exigences souvent bien plus élevées que l’attendu et on fait plus que nécessaire. Il apparait alors qu’on pourrait garder ce temps et cette énergie pour faire autre chose qui a encore plus de valeur pour nous. Il ne s’agit pas d’adopter une posture où on cherche à faire moins ou moins bien mais d’adopter une manière de fonctionner différente où tout le monde à quelque chose à y gagner.
Alors avant de vous lancer corps et âme dans votre prochaine activité, pensez à questionner la consigne et les attentes avec précision et en interprétant le moins possible !
Si vous vous reconnaissez dans ce comportement typique du "bon élève", que vous souhaitez aller plus loin dans sa compréhension et construire votre méthode pour produire un travail de JUSTE qualité, cette reflexion peut être accompagnée en coaching professionnel de manière pragmatique et personnalisée. Alors n'hésitez pas à prendre rdv, écrire un mail, téléphoner... pour poser vos questions.
Merci pour votre lecture !
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